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16 mai 2023

Page en regard de l’éditorial : C’est la Semaine nationale des soins infirmiers… mais est-ce que le personnel infirmier aura le temps de célébrer?

Blogue
Semaine nationale des soins infirmiers

Cette page en regard de l’éditorial a d’abord été publiée dans National Newswatch le 8 mai 2023.

C’est la Semaine nationale des soins infirmiers… mais est-ce que le personnel infirmier aura le temps de célébrer?

Par Linda Silas

La Semaine nationale des soins infirmiers est l’occasion de reconnaître le dévouement des infirmières et des infirmiers, et le rôle important qu’ils jouent dans le secteur de la santé. Nous savons que les personnes du Canada apprécient le personnel infirmier, et je saisis cette occasion pour exprimer un merci sincère aux 459 000 d’entre vous.

Comme plusieurs, j’aimerais avoir l’esprit à la fête, mais j’ai de la difficulté.

Bien avant la pandémie, les infirmières et les infirmiers ont sonné l’alarme par rapport aux pénuries de personnel et à la médecine dans les corridors, et maintenant nous sommes devant une crise encore pire que celle que l’on craignait.

Au cours du dernier trimestre de 2022 seulement, les postes infirmiers vacants au pays ont augmenté de 17 %. Un tiers des infirmières et des infirmiers ont plus de 50 ans et approchent l’âge de la retraite. Cela signifie que les taux de postes vacants vont continuer d’augmenter si on ne fait rien.

Le personnel infirmier travaille plus fort et pendant des heures plus longues, sans voir la fin de cette situation. Les heures supplémentaires ont atteint des sommets records l’été dernier, et cela va probablement se répéter cet été. Les heures supplémentaires obligatoires, les quarts de travail doubles et les vacances annulées sont maintenant chose commune. Pas étonnant de voir autant d’infirmières et d’infirmiers chercher la porte de sortie.

Selon un récent sondage commandé par la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers (FCSII), quatre infirmières sur 10 veulent quitter leur emploi ou la profession, ou prendre leur retraite. Pourquoi? La plupart mentionnent que leur milieu de travail est régulièrement en manque de personnel ou en situation de surcapacité.

Cela a un effet néfaste sur le personnel infirmier. Huit sur 10 affichent un type de burn-out, et sept sur 10 mentionnent des symptômes d’anxiété ou de dépression. Soyons clairs, ce que demande le personnel infirmier est vraiment élémentaire. La plupart disent que des horaires souples et des jours de congé garantis les motiveraient à demeurer au travail.

J’ai récemment parlé à une infirmière de première ligne expérimentée au sujet des longues heures de travail qu’on lui demande de faire. Elle dit que « autour de 20 heures d’affilée » elle commence à sentir de la confusion. Voilà des mots que ni les patients ni les membres de la famille ne veulent entendre.

En fait, les infirmières et les infirmiers sont constamment occupés pendant leur quart de travail, et les patients comptent sur eux pour leur bien-être. Or, on ne peut s’attendre à ce qu’un être humain puisse bien fonctionner après 20 heures et plus au travail, particulièrement considérant ce qui est en jeu au sein d’une unité dans un hôpital. Cela doit changer. Le fond du problème c’est que vous ne pouvez pas sauver des vies si vous ne dormez pas.

Je connais bien les infirmières et les infirmiers, et ils ne vont pas dire « non » lorsqu’on va leur demander de travailler après la fin de leur quart de travail. Ils ne veulent pas laisser leurs patients sans soutien, ni laisser tomber leurs collègues. Nos lois régissent strictement les heures de travail des conducteurs de véhicules lourds et des pilotes, mais le personnel infirmier ne bénéficie pas d’une telle protection.

Les infirmières et les infirmiers veulent qu’on les respecte. Et ils veulent être en mesure de dispenser les meilleurs soins possibles à leurs patients. Les syndicats infirmiers ont sonné l’alarme et, heureusement, certains gouvernements ont réagi. La Colombie-Britannique vient de devenir la première province au Canada à règlementer les ratios infirmière-patients. Cela va signifier des normes de soins claires et suffisamment de personnel infirmier pour prendre soin des patients dans les unités surpeuplées des hôpitaux. Sur la côte Est canadienne, les primes de maintien en poste pour le personnel infirmier de la Nouvelle-Écosse ont été une mesure accueillie favorablement – bien que trop longtemps attendue – pour améliorer le recrutement et le maintien en poste. Maintenant, nous avons besoin de voir ces types de mesures partout au pays si nous voulons maintenir en poste le personnel infirmier de première ligne et dispenser des soins de qualité aux patients.

Les nouvelles ententes bilatérales conclues entre le gouvernement fédéral et les provinces sont les bienvenues, mais en fait, les négociations vont exiger du temps. Et il n’y a plus de temps à perdre pour les infirmières et les infirmiers. Nous avons urgemment besoin d’un plan d’action pancanadien coordonné pour s’attaquer immédiatement au recrutement et au maintien en poste.

Dans l’intérêt du personnel infirmier, et aussi des patients, espérons que les gouvernements vont célébrer la Semaine nationale des soins infirmiers cette année en démontrant du respect envers le personnel infirmier et en leur offrant finalement un répit.

-30-

Linda Silas est présidente de la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers, voix nationale de près de 250 000 infirmières, infirmiers, étudiantes et étudiants en sciences infirmières.