Une crise sanitaire silencieuse menace de se déclencher à mesure qu’augmente le nombre des personnes qui ont du mal à payer leurs médicaments sur ordonnance.
Même avant le début de la pandémie, les statistiques étaient stupéfiantes.
Environ 7,5 millions de personnes—le cinquième des membres de la population canadienne—n’avaient pas d’assurance-médicaments ou en avaient une qui ne répondait pas à tous leurs besoins. Un ménage canadien sur quatre avait de la difficulté à trouver l’argent nécessaire pour acheter ses médicaments. Un million de Canadiennes et Canadiens réduisait ses dépenses alimentaires et de chauffage pour les payer.
Et, comme à bien d’autres égards de notre vie, la situation n’a fait qu’empirer depuis le début de la pandémie de COVID-19.
La pandémie a compliqué la capacité des gens de gérer les nouveaux diagnostics et les états chroniques et d’accéder à des traitements médicaux. S’ils n’ont pas les médicaments dont ils ont besoin, les gens peuvent voir empirer leurs problèmes de santé préexistants et être susceptibles de subir des effets plus graves en cas d’infection à la COVID-19.
La pandémie a en outre causé d’importantes pertes d’emploi, ce qui signifie que de nombreux travailleurs et travailleuses ont aussi perdu l’assurance associée à leur emploi.
Plus d’un million de personnes sont en chômage ou ont vu diminuer leurs heures de travail. Les Canadiennes et les Canadiens sont deux fois plus susceptibles d’avoir perdu leur assurance-médicaments que d’en avoir acquis une depuis un an. Ces résultats nuisent aux ménages racialisés, aux femmes et aux travailleurs à bas salaire plus qu’aux autres.
Ces nombres correspondent à des personnes éprouvant des craintes courantes au sujet de la façon de soigner leur santé.
Ce sont des personnes comme Heather Evans, mère au travail de Calgary qui est aux prises avec une maladie du cœur. Les médicaments de madame Evans lui ont coûté une somme mensuelle pouvant atteindre 1 000 $, et elle prend actuellement des médicaments qui pourraient lui coûter 46 000 $ par année. Heureusement, elle a une assurance-médicaments au travail. Cependant, elle n’en a pas toujours eu une. Par le passé, pendant qu’elle élevait son fils, elle a dû compter sur des échantillons gratuits fournis par sa clinique locale et économiser sur les biens de première nécessité pour sa famille afin de pouvoir prendre les médicaments nécessaires à sa survie.
Son histoire est beaucoup trop courante et illustre une lacune majeure du système de santé canadien.
Le coût prohibitif des médicaments sur ordonnance contribue à la mort prématurée, chaque année, d’environ 1 000 Canadiennes et Canadiens d’âge actif atteints d’une cardiopathie ischémique ou de diabète.
La mosaïque des plus de 100 régimes publics et 100 000 régimes privés d’assurance-médicaments qui existe au Canada constitue l’un des systèmes les plus coûteux du globe. L’instauration d’une assurance-médicaments universelle réduirait le total des dépenses associées aux médicaments sur ordonnance au Canada de 5 milliards de dollars par année.
Dans le discours du Trône de l’automne dernier, le gouvernement fédéral s’est engagé à « travailler de concert avec les provinces et les territoires qui souhaitent aller de l’avant rapidement ». Nous croyons qu’il est temps que les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral travaillent ensemble à l’instauration d’un régime national universel d’assurance-médicaments à payeur unique.
Des mesures doivent être prises sans tarder car nous n’avons pas les moyens d’attendre plus longtemps que soit posé ce chaînon manquant critique de notre système de santé.